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Fédération Béninoise de Boxe : 25,5 millions de subventions et après… ?

 

À première vue, tout semble aller dans le bon sens pour la Fédération Béninoise de Boxe (FEBEBOXE). Le  jeudi 15 mai 2025, elle a reçu une subvention de 25,5 millions de FCFA au titre de l’année 2025, confirmant son ancrage dans le cercle des fédérations soutenues par l’État. Une bonne nouvelle pour les amoureux du noble art au Bénin, mais une bonne nouvelle qui s’accompagne d’un lot d’interrogations légitimes. Car si l’État donne, il attend désormais des résultats. Et pour la FEBEBOXE, l’heure n’est plus aux discours , place à la performance, à la gouvernance exemplaire et à la professionnalisation durable.

On ne pourra pas dire que la FEBEBOXE est en sommeil. Depuis l’arrivée à sa tête de Pierre Léonard HINVI élu officiellement le 3 août 2022 après presque un an d’intérim , des lignes ont bougé. Des combats organisés, des formations dispensées, des jeunes révélés, des partenariats techniques noués (notamment avec l’expert français Pascal KUENZI DUVAL), une transparence budgétaire en construction avec l’installation des commissaires aux comptes… Autant d’initiatives qui méritent d’être saluées. Oui, il faut le reconnaître ,  un souffle nouveau a traversé les arènes poussiéreuses de la boxe béninoise.

Mais à l’heure du financement public, ce n’est plus le narratif qu’il faut travailler. Ce sont les résultats. Les standards. L’exemplarité.

En accordant les 25,5 millions de FCFA à la FEBEBOXE, le Ministère des Sports, par la voix du ministre Benoît DATO, a également dressé un cahier de charges clair : place à l’évaluation, à la rigueur, à la responsabilité. Les fédérations ne pourront plus bénéficier de fonds publics sans répondre à une batterie de critères précis : encadrement technique de qualité, gestion administrative saine, rayonnement international, organisation de compétitions, visibilité, performances sportives, sponsoring, gouvernance RH, etc.

Et là, la boxe béninoise est placée face à ses propres contradictions.

Des progrès, mais encore trop d’angles morts

La Fédération affiche un dynamisme certain. Mais ce dynamisme est parfois rattrapé par des pratiques d’un autre âge. Gestion encore trop centralisée, communication intermittente, tensions internes (comme l’illustre l’affaire TOGBAHOUN et sa suspension), déficit de sponsors pérennes, manque de compétitions régulières, formation des entraîneurs encore trop peu structurée, intégration timide des anciens champions comme encadreurs… La FEBEBOXE a souvent de l’élan, mais elle manque encore de continuité.

Et que dire de certains clubs encore non structurés, ou des talents perdus faute de suivi, notamment en milieu rural ? Que dire de l’absence de stratégie claire pour développer la boxe féminine, alors que le vivier est réel ?

« Jour de Boxe » : un concept prometteur mais fragile

L’initiative « Jour de Boxe », avec déjà deux plateaux programmés en 2025, témoigne d’une volonté d’animation du calendrier sportif. C’est une excellente idée. Mais attention, un événement ponctuel ne fait pas une politique sportive. Le nombre de combats réduit pour le second plateau du 18 mai (cinq au lieu de sept) à cause de KO et de blessures, en dit long sur le besoin d’encadrement médical solide, de rotation des boxeurs, et de profondeur de vivier. Là aussi, des efforts doivent être faits pour structurer.

La transparence, oui. Mais la performance aussi !

L’installation des commissaires aux comptes en mai 2025 est un signal fort. Elle montre que la Fédération a compris que la gestion financière ne peut plus être approximative. Mais les chiffres doivent désormais rimer avec performances. Le Bénin s’est désaffilié de l’IBA pour rejoindre World Boxing. Très bien. Mais que fait-on concrètement pour s’aligner sur les exigences olympiques ? Quels sont les boxeurs béninois véritablement capables de briller à Dakar 2026 ou à Los Angeles 2028 ? Où en est-on avec l’accompagnement psychologique, la récupération physique, l’appui nutritionnel, le suivi post-compétition ? Ce sont là les vrais leviers de la haute performance.

L’appel aux anciens : capital non exploité

Ils sont là, les anciens. Dans l’ombre. Ils ont porté les couleurs du Bénin sur des rings africains ou européens. De George BOCO passant par Victor PADONOU à Fulbert SODJINOU pour ne citer que ceux là toujours vivants et actifs, ils connaissent le goût du sang, de la sueur, des sacrifices. Mais ils ne sont que trop rarement intégrés dans les circuits de formation. L’expertise locale est négligée au profit d’un élitisme technique mal calibré. Il faut repenser l’écosystème. Créer des ponts générationnels. Transformer les anciens en mentors. Les écouter. Les impliquer. Car l’expérience ne s’achète pas, elle se transmet.

Vers un vrai modèle économique de la boxe ?

Avec 25,5 millions en caisse, la FEBEBOXE a une opportunité unique , poser les bases d’un modèle économique durable. Il ne suffit pas d’organiser des compétitions, il faut vendre du spectacle, attirer des partenaires, créer des produits dérivés, développer des académies, médiatiser les figures montantes, créer des ligues jeunes, générer de la valeur. Le sport ne vit plus uniquement de la subvention. Il doit séduire. Fidéliser. Monétiser.

La boxe béninoise, à l’épreuve de la vérité

Alors, oui, cette subvention est une bonne nouvelle. Oui, le président Pierre Léonard HINVI mérite d’être félicité pour sa vision, son activisme, son engagement. Mais l’heure est venue de passer de la gestion d’urgence à la gouvernance stratégique. De l’événementiel à la politique sportive intégrée. Du discours à l’impact.

Car désormais, chaque franc versé par l’État devra être justifié par une performance, une réforme, une avancée concrète. C’est la règle du jeu. Et elle est valable pour toutes les fédérations.

2025 s’ouvre comme une année charnière. La Fédération béninoise de boxe n’est plus dans l’ombre. Elle est attendue. Par l’État. Par les partenaires. Par le public. Par les boxeurs eux-mêmes. Les 25,5 millions de FCFA doivent être un point de départ, pas une ligne d’arrivée. Un levier, pas une fin en soi. Ce serait une grande victoire pour toute la famille de la boxe béninoise de voir cette subvention doubler en 2026.

Et si la FEBEBOXE veut faire honneur au noble art, elle devra désormais boxer avec la tête autant qu’avec les poings.

À suivre…

Nel Charbel KOFFI 

Nel Charbel Koffi

Nel Charbel Koffi

About Author

Nel Charbel Koffi est un journaliste professionnel spécialisé dans le journalisme sportif. Il se démarque par son engagement

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